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Attentat de la rue Copernic : Face au défi des preuves, l’intime conviction d’un chef du renseignement
TERRORISME - En 1999, le n°2 des services de renseignements transmet une note au juge d’instruction évoquant la piste « Hassan Diab », près de vingt ans après l’attentat de la rue Copernic. L’homme est jugé, en son absence, depuis lundi. A la cour d’assises spécialement composée, à Paris,
Sa conviction, Louis Caprioli, l’ancien sous-directeur de la DST, le service de renseignements de l’époque, se l’est forgée il y a bien longtemps. « Je suis convaincu qu’Hassan Diab est le poseur de bombe », insiste à la barre cet homme de 80 ans au terme d’un impressionnant exposé, sans la moindre note, pendant près de six heures. Depuis maintenant une semaine, la cour d’assises spécialement composée remonte chaque jour le temps jusqu’au 3 octobre 1980, date du premier attentat antisémite en France depuis la Seconde Guerre mondiale. Ce jour-là, peu après 18h30, une bombe explose devant la synagogue de la rue Copernic, dans le 16e arrondissement de Paris, faisant quatre morts et une quarantaine de blessés. Mais quarante-deux ans après les faits, le box des accusés est vide : si Hassan Diab, professeur de sociologie libano-canadien, a finalement été renvoyé pour « assassinats et tentatives d’assassinat », il se trouve actuellement au Canada.
Son nom apparaît pour la première fois en avril 1999 dans une note de la DST. A cette époque, le dossier a sombré depuis bien longtemps dans les limbes de la justice. La piste néo-nazie, privilégiée juste après l’attaque, a rapidement été abandonnée. Et si les enquêteurs ont acquis la certitude qu’elle a vraisemblablement été orchestrée depuis le Moyen-Orient, ils piétinent. « Le 3 octobre, quand l’attentat est commis, nous n’avons aucune information d’aucune sorte », se remémore Louis Caprioli. Pendant des années, son service est « démuni » et peine à collecter des informations pour reconstituer le puzzle.
« Nous sommes convaincus que nous sommes sur les bons individus » Après la guerre civile au Liban et la chute du mur de Berlin, les langues commencent à se délier, certaines sources sortent du silence. La DST reçoit des informations de services étrangers. L’Allemagne transmet notamment plusieurs notes déclassifiées de la Stasi. « Nous avons recoupé les bribes d’informations, poursuit le n°2 de la DST. Quand nous adressons le rapport [au juge d’instruction], nous sommes convaincus que nous sommes sur les bons individus. » Le FPLP-OS – Front de libération de la Palestine-Opération spéciale – est désigné comme étant le groupe terroriste qui a commandité l’attentat.
Et si une dizaine de noms sont égrainés dans la note, un ressort nettement : Hassan Diab est désigné comme celui qui a confectionné la bombe et l’a déposée. « Je regrette le temps qu’il a fallu pour recouper les sources, avoir les renseignements, pour que la procédure avance », insiste Louis Caprioli, la gorge nouée, s’adressant directement aux victimes.
L’enquête, pourtant, va piétiner et ne connaître aucune avancée notable pendant huit ans. En 2007, c’est au tour du magistrat Marc Trévidic de se replonger dans le dossier. « Un juge d’instruction ne demande pas d’où viennent les sources. La seule question qu’on pose, c’est : "Est-ce qu’elles vous paraissent fiables ?" », explique-t-il à la barre. Mais les renseignements, s’ils permettent de privilégier des pistes, d’orienter des enquêtes, nécessitent d’être vérifiés, étayés pour avoir du poids dans un dossier judiciaire. « Je savais qu’il allait falloir tout démontrer, que c’était le FPLP-OS, que les membres étaient les bons », poursuit le magistrat.
Des informations difficiles à recouper Et c’est là toute la difficulté du dossier : difficile de recouper des renseignements trente ans après. Les scellés ont brûlé dans un incendie. Les quelques documents d’époque ont tellement été manipulés que les empreintes ne « matchent » pas. Même les éléments les plus tangibles se révèlent difficiles à exploiter. A l’instar du passeport d’Hassan Diab, retrouvé à Rome en 1981 dans les affaires d’un homme - proche du FPLP-OS - en provenance du Liban. La photo correspond à s’y méprendre au portrait-robot émis après l’attaque. Problème : les enquêteurs n’ont qu’une copie du passeport, le vrai a disparu. « Mon problème, c’est de m’assurer qu’il n’y a pas eu de substitution de photographie », explique le magistrat. Or, Marc Trévidic ne parviendra jamais à mettre la main sur l’original. De même, certains témoignages assurent qu’Hassan Diab était proche du FPLP-OS – lui jure que non –. Mais quel crédit apporter à ces récits aussi longtemps après les faits ?
En 2008, Marc Trévidic finira par émettre un mandat d’arrêt international visant l’universitaire. Il sera accordé par le Canada en 2014, au terme d’une longue bataille juridique. Sitôt arrivé en France, Hassan Diab est placé en détention provisoire. Il y restera trois ans. Mais en 2008, le dossier prend une tournure inattendue : les successeurs de Marc Trévidic rendent un non-lieu. « Les magistrats instructeurs ont écrit : "on ignore l’origine de ces renseignements, il est donc extrêmement difficile d’apprécier leur véracité" », rappelle Me William Bourdon, qui défend Hassan Diab. Ce non-lieu a finalement été invalidé trois ans plus tard, d’où la tenue de ce procès. Le verdict est attendu le 21 avril.
Source: 20minutes.fr
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